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Jules Verne pensait que les volcans islandais permettaient
d’accéder au centre de la terre. Si sa théorie s’est révélée
scientifiquement infondée, l’île nordique a effectivement été
ces derniers jours le nombril du monde. Car c’est bien la planète entière
qui s’est trouvée bouleversée par les magmas en fusion de l’Eyjafjöll, qui
ont provoqué une catastrophe économique dont les conséquences devraient
dépasser celles des attentats du 11 septembre 2001 selon les experts.
Le 20 septembre dernier, veille de la reprise quasi totale du trafic aérien,
la facture s’élevait déjà pour les compagnies aériennes à 1,7 milliard de
dollars. A ce manque à gagner s’ajoutent les coûts supportés par les
compagnies pour l’hébergement, la nourriture et parfois le transport
par d’autres moyens de voyageurs bloqués. Quant aux conséquences
sur les autres secteurs économiques, aux quatre coins de la planète,
elles sont pour le moment non quantifiables. Certains journaux se sont
« amusés » à lister les produits sinistrés par la suspension du trafic aérien
en Europe, des téléphones coréens au saumon norvégien, du marché des
fleurs hollandais aux haricots verts kényans, en passant par les voitures
japonaises… Sans parler du courrier suspendu, des salariés bloqués à
l’étranger et donc absents de leur lieu de travail et des conséquences
néfastes sur le tourisme. Bref, il faudra plusieurs semaines pour envisager
un retour à la normale et il est probable que nombre d’entreprises ne s’en
remettront pas. On peut toujours se consoler en se disant que nous avons
échappé au pire : l’éruption d’un autre volcan islandais, le Laki, en 1783,
avait assombri le ciel européen pendant une année…
Reste que cette nouvelle manifestation de l’« effet papillon » selon lequel
« le battement d’ailes d’un papillon au Brésil peut provoquer une tornade
au Texas », qui arrive juste après la crise financière internationale, a été
fascinante à observer. Elle nous dit que la mondialisation, si elle constitue
indéniablement un progrès en passe de faire disparaître la notion même de
« Tiers-monde » grâce à l’interdépendance des économies, comme vient
de l’affirmer le président de la Banque mondiale, Robert B. Zoellick, peut
aussi constituer une bombe à retardement. Comme l’observait le chercheur
anglais Henry Havelock Ellis il y a près d’un siècle : « Ce que nous appelons
progrès est le remplacement d’un inconvénient par un
autre ».
La rédaction
Photo montage réalisé
par VH magazine