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L’arbitrage Royal est venu bousculer un
immobilisme devenu dangereux à terme,
car porteur de dérives et de régressions.
Alors que le microcosme politique s’est
enfoncé dans le marécage des compro-
missions et des marchandages, au cours
des dernières échéances électorales,
qui pouvait en attendre une quelconque
avancée sur la voie des réformes ?
L’impulsion du changement a émané d’une
volonté et d’une décision du Souverain.
Objet depuis des décennies de combat
solitaire des organisations féministes,
ce changement n’a pas trouvé de relais
conséquents et non timorés chez les partis
politiques. Il intervient aujourd’hui sur un
plan décalé par rapport à la scène poli-
tique vouée à un électoralisme dévoyé. Les
réactions enregistrées au lendemain du
discours Royal furent tout à fait prévisibles,
contrairement à ce dernier.

MUTATION SUR TROIS PLANS

Le nouveau Code de la famille apporte une mutation sur trois et modifi able de la famille et de la société, soumise à la raison
plans essentiels : humaine et au débat public et pas seulement aux interprétations
Il institue d’abord l’égalité de principe entre hommes et femmes en vase clos des Oulémas.
dans la famille ; le principe de supré- La réflexion doit aussi être poussée

matie de l’homme est remis en cause, pour savoir pourquoi un tel changement
le patriarcat qui avait un fondement a paru inéluctable au Roi, après une
dans une société où l’individu, homme longue gestation et des confrontations

ou femme, était soutenu par son groupe sans fin au sein de la commission de
(familial, tribal, etc) est dépassé dans révision.
les faits dans la société actuelle: la loi On peut supposer que cette réforme
est ainsi mise à jour pour coïncider était devenue nécessaire à la fois comme
davantage avec les réalités et non plus symbole et comme impulsion pour remuer
leur tourner le dos. un tant soit peu une société bloquée et
Le nouveau texte privilégie une vision ankylosée par ses conservatismes et ses
humaniste des rapports familiaux et au anachronismes. Il fallait, quelque part,
sein de la société ; les notions de droits casser le cercle vicieux où l’immobilisme
des individus, à commencer par celui et les retards s’aggravent alors que les
de prendre ses propres décisions, de problèmes liés à l’économie de rente et à
ne pas être opprimé et d’être heureux, la fracture sociale risquent à tout moment
vont devenir la norme au lieu des tradi- de dégénérer. Il s’agit de réveiller une
tions ou coutumes autoritaires, niant société, au risque de la bousculer pour

les individus et imposant des carcans qu’elle réalise enfin où elle en est dans
d’un autre âge. l’évolution du monde aujourd’hui. Un rôle

La troisième mutation, enfin, concerne la désacralisation de la en principe dévolu aux partis politiques, mais qu’ils n’ont mani-
loi. Celle-ci n’est plus confondue avec les préceptes religieux festement jamais pu réussir ni même assumer. Il faut changer ou
immuables, mais considérée comme une régulation relative dépérir : telle est la leçon du nouveau Code de la famille.

Mars 2018 VH magazine 67