Page 70 - VH Magazine N°114 - Novembre 2012
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subsisteraient aujourd’hui avec kilomètres à l’ouest d’Al-Hoceïma, ville prospère, dite Mouchtaraya caravanière, Massa n’en déclina pas
un quartier de ce nom au sud-est c’est la ville de Badis, aujourd’hui un (appelée aussi Gharbiya), dont les moins au 17e siècle, au point de
de Béni Mellal. « Elle est classée charmant village qui nous convie. ruines seraient aujourd’hui visibles disparaître.
au rang de simple forteresse Certains l’identifient à la cité de à environ 20 km au sud-est de la
par les uns ou de cité au passé fondation romaine de Parientina. forteresse de Oualidiya. Jouxtant le Tamedourt
prestigieux par d’autres. Quant à sa D’autres attribuent sa fondation territoire de la grande tribu berbère Si certaines villes disparues n’ont
fondation, elle est attribuée tantôt aux Wisigoths, tandis que l’historien masmoudienne des Mouchtaraya pas même laissé de preuves de
aux Idrissides, tantôt à l’Almoravide marocain Abou-l-Qassem Zayani dont elle dépendait, la ville aurait été leur existence par un patronyme qui
Youssef ben Tachfine, si ce n’est aux renvoie sa création, en l’an 90 de fondée par des membres de cette serait encore porté, elles ne sont pas
Almohades à cause de la similitude l’Hégire, aux Berbères zénètes tribu, selon Ahmed Ben Brahim moins encore mentionnées dans
architecturale de son minaret avec (du groupe Louata) venus de l’Est, Mouchtarayi dans son livre Silsilat l’histoire des tribus qui y ont vécu.
celui de la Koutoubiya. De par son considérés comme les premiers al-dahab al-manqoud. Elle est C’est le cas de la ville de Tamedourt,
emplacement stratégique au milieu islamisés parmi les Berbères par décrite par des voyageurs anciens mentionnée dans la généalogie de
de la province, la richesse de son Ibn Khaldoun. C’est au Moyen-Age tels qu’Ibn-el-Khatib, Hassan tribus telles que celle des Aït Mzal.
sol, la qualité de ses hommes, saints que notre ville se démarque comme El-Ouazzan ou Luis Marmol, ce Riche cité minière et caravanière,
et savants, Day a connu un grand port d’envergure, fréquenté par des dernier rapportant, au 16e siècle, la Tamedourt était située au pied de
rayonnement culturel aux XIe-XIIe navires commerciaux en provenance richesse de son urbanisme et de son Jbel Bani, à l’emplacement privilégié
siècles, si l’on devait se référer au de Pise, de Gênes, de Venise ou de agriculture et le nombre important sur la route de l’or de Blad Soudane.
foisonnement de savants et de Marseille. Nourrie également de ses de ses habitants, ce qui en faisait On attribue sa fondation à Abd-
saints qui en sont originaires. Mais contacts avec l’Andalousie voisine la capitale de la région. Occupée Allah ben Idris II qui avait reçu de
en 1163, elle subit un cataclysme et avec l’Orient, la ville aurait joué un par les Portugais en 919/1513, la la part de son frère aîné au pouvoir,
non identifié qui fit fuir ses habitants rôle prééminent sur le plan mystique ville fut détruite pour cette même Aghmat, Nfis, le pays Masmouda et
vers Marrakech et Fès. depuis le début du XIIIe siècle, avant raison en 921/1515 par le frère du le Sous-Extrême, selon l’auteur Ibn
de s’illustrer dans le combat maritime sultan wattasside Mohamed Cheikh Abi-Zar’. Au XIVe siècle, pour des
Ghssassa avec l’avancée de la Reconquista et ses habitants déplacés dans la raisons imprécises, relatées par les
Autre patronyme renvoyant à une au XVIe siècle. Occupée par les région de Fès. Repeuplée, elle fut récits légendaires, la cité connaît
ville qui n’existe plus, El-Ghissassi, Espagnols en 1508, marquant définitivement abandonnée par ses la destruction et la ruine, prélude à
de la ville de Ghssassa. « Un ainsi le début de son déclin, la ville habitants, peu de temps après, vers l’exode de ses habitants, dont un
port méditerranéen florissant du revint onze ans plus tard dans le de nouvelles destinations comme grand nombre s’établit dans les
Moyen-Age, aujourd’hui en ruines. giron national. Elle devint le refuge Marrakech. » montagnes et les vallées de l’Anti-
Son nom, la ville de Ghssassa le des corsaires turcs en 1554 qui Atlas.
tiendrait de la tribu berbère des en firent une base d’expéditions Targha Au titre des villes disparues, on
Ghssassa, branche des Meklata en Espagne, ce qui lui valut d’être Sous le nom de famille Targhi, le peut citer également celles de Mlija,
zénètes. Ibn Khaldoun présente une attaquée, dix ans plus tard, au moyen Dictionnaire des noms de famille dont sont originaires les Mliji et qui
théorie selon laquelle les Meklata de quatre-vingt-dix galères. Après revient sur la ville médiévale disparue fut détruite par les Portugais en
seraient arabo-yéménites. Quoi le règne saâdien, Badis perdit de de Targha. « C’est en pays Ghomara, 1508 ; Seddina, mentionnée sous
qu’il en soit, une fraction de la tribu son prestige et de son rayonnement entre Badis et Sebta, que se situe ce l’ethnique Sadni, située dans le
Ghssasa résida anciennement d’autrefois et tomba, peu à peu, port. D’origine idrisside, sa forteresse Moyen-Atlas, sur le territoire de la
dans le Rif, au voisinage des tribus dans l’oubli. Quant à la presqu’île est almohade, son apogée est tribu berbère des Aït Sadden, rangée
berbères Botouïa et laissa son contiguë à la Méditerranée, dite mérinide, de même que son déclin, parmi les tribus qui ont apporté leur
nom à la ville de Ghssassa, sur la Hajarat Badis, reliée à la cité par à la fin de ce règne, à cause des allégeance à Idris 1er; la ville de
côte méditerranéenne, appelée une allée de sable, elle est occupée attaques portugaises. Refuge des Mahila, fondée par la tribu zénète
auparavant Al-Koudya al-Bayda. en 1566 et demeure, jusqu’à Mauresques chassés d’Andalousie, Maghila venue dans le sillage de
Erigée au rang de cité sous les nos jours, sous la domination des Targha s’illustra également pour sa la conquête musulmane dont elle
Almohades, prépondérante sous les Espagnols qui la baptisent Penon résistance contre les Ibères, ce qui suivit le mouvement et qui est aussi
Mérinides, elle se distingua comme de Velez de la Gomera (Rocher de lui vaudra d’être razziée à plusieurs rangée parmi les tribus qui ont
port de commerce avec l’Europe, Badis Ghomara). De Badis sont reprises aux XVe et XVIe siècles, apporté leur allégeance à Idris 1er
entretenant des liens privilégiés issues des personnalités de renom, avant que ses habitants ne soient ; la ville d’Angad, sur les ruines de
avec le royaume Nasride de comme le cheikh mystique adulé déportés par le sultan wattasside. laquelle fut construite Oujda ; la ville
Grenade, avant de subir l’occupation Abou-Yaâqoub el-Badissi (mort en N’ayant pu retrouver son passé de Jouta où vécurent les Idrissides
portugaise vers 1506, peu après 1333) ou encore Abd-el-Haqq ben glorieux, la ville de Targha est chassés de Fès ; de Tigisas ;
l’occupation de Mellilia. Aujourd’hui, Ismaïl el-Badissi, d’origine andalouse, reléguée, dès le XIIe siècle, au stade d’Illigh ; de Nfi fi ...
comme vestiges de sa destruction de souche yéménite, auteur d’un de petit village de pêcheurs. Son nom Dans le Sahara, on peut aussi citer
au XVIe siècle, il subsiste quelques célèbre ouvrage dédié aux saints du reste attribué aux tribus Béni Targha, la ville de Ziz, îlot de civilisation
ruines, visibles à dix kilomètres à Rif, intitulé Al-Maqsad al-charif. De à une rivière et à une vallée à environ berbère mentionnée par le grand
l’ouest de Mellilia. » même que des dizaines de familles, dix kilomètres de Oued Laou. » géographe andalou El-Bakri. Sa
installées anciennement à Fès ou à chute aurait été provoquée, selon
Badis Tétouan. » Massa cet auteur, par l’importance qu’avait
Sous le nom el-Badissi, Mouna C’est sous le patronyme el Massi prise sa voisine Sijilmassa au 2e/7e
Hachim évoque l’histoire d’une Mouchtaraya que Hachim revient sur l’histoire de siècle, avant d’être défi nitivement
autre ville rayée de la carte, « C’est au coeur de Doukkala, Massa, une ville médiévale au port ruinée en 454/1062 sous le coup
Badis. « Toujours sur la côte raconte Mouna Hachim sous le nom très important occupant une position de la conquête almoravide. Autres
méditerranéenne, près de oued de famille, el Mouchtarai, qu’était stratégique du Sud marocain. Pôle villes disparues du Sahara, celles de
Nekour, à environ cinquante nichée dans les temps anciens une commercial, étape maritime et Awdaghost, Oualata, Aretnana...
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