Page 36 - VH Magazine N°187 - Novembre & Décembre 2020
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LA COUV’  I I  Leila Alaoui



           Le Père

           OFF TO OUAGA : JOUrnALd’Un deUiL

            imPOssibLe










           Accueillant et chaleureux, Abdelaziz
           Alaoui vous accueille chez lui comme
           s’il accueillait la famille. Si la maison
           ne lui convient plus et qu’il est d’avis
           de quitter les lieux, tant il « voit Leila
           partout », il a choisi d’écrire le journal
           d’un deuil impossible, celui d’un père
           qui perd son enfant, sa meilleure amie,
           sa fierté. Dans « Off to Ouaga » qu’il a
           avoué écrire en 3 semaines, telle une
           évidence, il raconte le récit sidérant
           de l’annonce de la mort et des étapes
           de l’acceptation du deuil. « J’ai mis du
           temps à me décider. Après un déjeuner
           avec un imminent professeur, j’avais
           le livre en tête. Il me fallut écrire »
           explique le père de la photographe
           qui, pendant 3 semaines ne faisait
           « qu’écrire, manger et dormir ». Il
           y avait urgence. Dans le roman, on
           apprend que la famille était à Paris.
           Leila partait à Ouagadougou pour
           Amnesty International de la capitale
           française. « Papa ! Off to Ouaga » lui
           avait -elle lancé en guise d’Adieu, en
           quittant l’appartement parisien. Ce 15
           janvier, Aziz et Soulaimane rentraient
           de Paris, Christine venait les récu-
           pérer de l’aéroport. Cette dernière
           échangeait avec sa fille, s’enquérant de ses nouvelles quand la nouvelle tombe.
           C’est Leila elle-même qui enverra un message pour prévenir qu’elle avait été
           victime d’un attentat. « Ça va, ça va mais il faut venir me sauver, prévenez
           Amnesty». La photographe était au Café Capuccino pour acheter une salade quand
           elle reçoit des coups de feux des assaillants . La famille panique, tout le monde
           se rue sur les téléphones pour demander de l’aide. Leila, aidé par un homme à
           moto s’achemine à un dispensaire à côté de l’aéroport. Après plusieurs coups de
           fils, Leila est transporté à la meilleure clinique de la ville selon l’Ambassadeur
           du Maroc sur place. Après plusieurs tentatives de rapatriement, son frère fait le
           déplacement presque le jour même pour être à ses côtés. « She is in bad shape»
           avouera Soulaimane à son père. On ne dira rien à la mère. Elle succombera à
           ses blessures quelques jours plus tard.


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