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NOTRE ÉPOQUE  I I  Marché de l’art

                 On évoque aussi avec insistance
                 «la multiplication des faux en
                 tous genres, encouragée
                 par les cotes sans précédent
                 atteintes par les peintres aussi
                 bien orientalistes que maro-
                 cains.», comme l’explique
                 Saïd Housbane, incarnant une
                 nouvelle génération de plas-
                 ticiens au Maroc. S’ajoutent
                 à cela, «l'impossibilité objec-
                 tive de recourir à un système
                 d'expertise suffisamment fi able

                 pour rassurer une clientèle
                 de plus en plus échaudée par
                 les mésaventures des uns et                    1   2
                 des autres.» Souvent, ce sont                                                 Hassan El Glaoui.
                 des peintres qui remplissent   3
                 le rôle d’experts. Il y a aussi,
                 selon le même Housbane:                                                      4
                 «l’écroulement du réseau
                 traditionnel des antiquaires et
                 brocanteurs, réseau qui avait
                 assuré jusqu'à, il y a encore
                 quelques années, l'essentiel
                 des transactions en antiquités
                 et objets d'art.» Reste que
                 l’avènement depuis moins d’une
                 décennie des maisons de ventes
                 aux enchères tend à rééquilibrer
                 ce marché, qui a besoin d’au
                 moins d'une autre décennie pour
                 ancrer ses assises plus profon-
                 dément dans les pratiques
                 marchandes des Marocains                                           © Leila Alaoui
                 férus d’arts plastiques. Il faut
                 aussi insister sur le fait que   talents, les véritables artistes”,  des doigts au Maroc. Il faut   1. Chaibia Talal, une pionnière, une

                 quand on parle de marché de   affi rme Nabil Mellouki, de la   avoir le courage de reconnaître   figure incontournable des arts maro-
                 l’art, c’est principalement la   galerie Matisse de Marrakech.  que l’erreur est partagée entre   cains.
                 peinture qui tire le gros lot des   Quant aux ventes et aux collec-  certains pseudo-collectionneurs
                                                                                                  2. Houcine Talal, pionnier, grand galer-
                 transactions. La sculpture et les   tions, en dehors de quelques   et certaines galeries médio-  iste, un artiste de la première heure
                 objets d’art peinent encore à   rares connaisseurs, “Une bonne   cres qui font du très mauvais
                 rivaliser avec le commerce des   partie des acheteurs le fait par   travail”.    3. Farid Belkahia a donné aux Arts
                                                                                                  plastiques marocains une réelle place
                 tableaux. On parle bien d’art de   ostentation, explique Nabil   Pour Hicham Daoudi, patron
                                                                                                  à l'international.
                 tous genres, peinture, sculpture,  Mellouki. C’est décevant car   de la compagnie marocaine
                 céramique, broderies, soieries,  souvent, ces personnes n’ont   des oeuvres et objets d’art   4. Abderrahim Iqbi, peintre maudit,
                 tissus, or, argent, verreries, bois,  aucune connaissance de la   (CMOOA) qui vient de fêter sa 50   énorme potentiel.
                 pierres et tant d’autres variétés   peinture et des Arts plastiques.  ème vente, “Il existe de bonnes   5. Fouad Bellamine, figure majeure de

                 artistiques avec des supports   Elles ne participent aucune-  galeries solides avec des artistes   la peinture marocaine.
                 différentes, des matériaux   ment au développement du goût,  contemporains qui s'affi rment
                 différents et donc des clientèles   à l’éclosion d’une réelle valeur   continuellement. De nouveaux   6. Mahi Binebine, toujours une valeur
                 différentes : “Le marché de l’art   d’art en donnant la chance à   arrivants trouvent aussi des   incontournable du mar hé de l'art au
                                                                                                  Maroc et ailleurs.
                 au Maroc est instable. Pour   d’autres créateurs d’exister et   projets audacieux à mener en
                 nous autres professionnels   de produire du beau”.  dehors parfois des galeries, et   7. Saad Hassani, immense figure des

                 du secteur, on se rend compte   A qui la faute alors? “Les vrais   il existe plusieurs maisons de   arts plastiques au Maroc. Il a aussi une
                 qu’Il y a moins de place pour   collectionneurs qui n’achètent   ventes aux enchères qui sont   grande notorité internationale.
                 les jeunes artistes que pour des   pas n'importe comment et qui   actives. De plus la réputation   8. Mohamed Kacimi, un grand peintre
                 artistes incontournables. Il faut   ont une véritable stratégie en   de nos artistes pionniers est   doublé d'un grand poète. Artsite majeur,
                 que ça cesse. Chacun doit avoir   ce qui se réfère à leurs acqui-  aujourd'hui affirmée sur les   il a donné ses lettres de noblesse à la
                 sa chance, surtout les bons   sitions se comptent sur le bout   scènes mondiales.”  peinture marocaine.


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