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CASABLANCA 1920 -1970 I I  Histoire d’une ville


                  Des gens comme Candilis
                  ont mis en œuvre certains     Place de France.
                  principes modernes en
                  combinant l’habitat traditionnel
                  et le collectif, d’où les fameux
                  immeubles Nids d’Abeille et
                  Sémiramis, avec les patios
                  superposés, la référence
                  aux casbahs, etc. Ces deux
                  bâtiments vont devenir
                  les icônes du ‘Mouvement
                  Moderne’. Des photos vont
                  être publiées dans le monde
                  entier, elles vont faire les
                  couvertures des revues
                  d’architecture. Au début
                  des années 50, Casablanca
                  est donc une espèce de
                  phare qui rayonne par ses
                  réalisations. Mais la plupart
                  de ces gens-là vont repartir.
                  En 1952, Ecochard est
                  écarté très violemment de ses
                  responsabilités et du Maroc
                  en raison de l’importance qu’il
                  donne à l’habitat social et au
                  relogement de bidonvilles. »




                    HAY HASSANI OU LE DÉBUT DE LA FIN                                             En 1959, le roi Mohammed V lance l’édification
                                                                                                  du quartier Hay Hassani en présence du prince
                                                                                                  héritier Moulay Hassan.
                  Dans la foulée, après
                  l’indépendance, d’autres
                  programmes sont mis en place
                  avec des architectes marocains,
                  comme Elie Azagury et Jean-
                  François Zevaco. C’est notamment
                  le cas de Hay Hassani. « Le
                  quartier s’appelait alors Derb Jdid,
                  précise Jacquelin Alluchon. La
                  grande nouveauté était la diversité
                  de l’offre : des petites maisons,
                  des maisons groupées, de petits
                  immeubles, des immeubles
                  plus grands... Le tout avec un
                  espace public extrêmement
                  bien étudié et hiérarchisé. Ce
                  programme est actuellement
                  étudié par toutes les écoles                                                    de tous les possibles : « Ce qu’on
                  d’architecture du monde car il                                                  pourrait dire de Casablanca et
                  a été un des premiers destinés                                                  des gens qui ont fait la ville, c’est
                  au relogement des bidonvilles.                                                  leur confi ance dans l’avenir et
                  Donc, la tradition casablancaise   Mohammed V inaugurant le quartier Hay Hassani.  l’envie d’innover, de marquer
                  de chercher et d’innover perdure                                                une histoire qui est celle du
                  après l’indépendance, alors que   programmes visionnaires à   1910 », constate Jacqueline   Maroc mais qui s’inscrit aussi
                  beaucoup de capitaux sont partis,   voir le jour à Casablanca. « La   Alluchon. Mais cette fois, les   dans une vision plus universelle :
                  mais avec autant de ferveur de la   ville s’est laissée grignoter par   spéculateurs ont gagné et   être un exemple de quelque
                  part de cette nouvelle génération   la spéculation. Ça a toujours   déplore Rachid Andaloussi, « on   chose, dit Jacqueline Alluchon.
                  d’architectes, dont ceux regroupés  été comme ça à Casablanca :   a oublié les urbanistes et les   Même dans les couches les plus
                  dans l’Ecole de Rabat. »   un affrontement entre la   architectes ».            défavorisées, il y avait ce désir
                  Aussi réussi qu’il soit, Hay   réglementation, l’administration et   Reste le souvenir d’une époque   d’habiter autrement, de vivre
                  Hassani sera le dernier des   les spéculateurs, dès les années   bénie où Casablanca était la ville   autrement. »



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