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NOTRE ÉPOQUE I I Mon Maroc

LEILA GHANDI
photographe, artiste pluridimensionelle

NOUS AVONS BESOIN SANAA ALAOUI, actrice
Nous sommes actuellement à une période charnière de l’his-
DE COURAGE toire du Maroc ! C’est aujourd’hui que tout se joue. L’arrestation

Le Maroc est en pleine mutation. Nous vivons une des ﬁlles d’Inezgane a été le déclencheur d’un cri collectif étouffé
depuis longtemps chez beaucoup, et qui inspire une nouvelle ère,
période fascinante car tout est possible, et aussi inquié- celle d’un changement positif.
tante, parce que tout est possible. Des réformes ont été La rage au ventre contre ce machisme et cette injustice, j’ai décidé
enclenchées, la constitution a été révisée, de nouvelles de créer une association qui me tient à cœur depuis longtemps :
lois ont été adoptées, et cela est une très bonne chose. JE SUIS FEMME JE SUIS LIBRE. Actuellement un groupe sur
Mais la route est encore longue et elle est semée d’em- facebook où j’invite le plus grand nombre à nous rejoindre ! J’ai
buches. Les textes peinent à être appliqués au quoti- mis volontairement FEMME et LIBRE dans le titre, car il est temps
dien, les mentalités ne suivent pas le rythme des lois de casser cette image collective fausse et machiste, où « femme
lorsqu’elles existent, des droits pourtant inscrits dans la libre » égal « femme dépravée ». Une femme libre est une femme
Constitution ne sont pas encore respectés, comme par responsable de ses choix, de sa vie, de ses idées, une femme
exemple l’égalité homme-femme. Les nombreux faits respectée dans sa dignité, et qui ne courbe plus l’échine pour

divers auxquels nous assistons, des ﬁlles d’Inzegane au satisfaire une société patriarcale, machiste et misogyne. Il est
travesti de Fès en passant par la jeune mère tangéroise temps de lui rendre sa liberté ! Mon combat depuis toujours et je
agressée, sont des alertes. Je suis révoltée de voir des le défendrai jusqu’au bout.
marocains se faire justice eux-mêmes, effrayée de les La montée de l’intégrisme, la recrudescence de la violence,
voir se radicaliser, dégoutée par leurs comportements l’anarchie avec des groupes de jeunes qui font leur propre loi et
indignes, atterrée qu’ils puissent penser avoir raison, sèment la panique dans le pays …Tout cela fait que le changement
choquée par le peu de réaction. En plus d’une révolution est urgent.
de l’éducation nationale et d’une révision des valeurs Il reste également un gros travail quant à l’éducation, notamment
qui sont inculquées, nous avons besoin de courage, celle des enfants des milieux ruraux qui n’ont pas accès aux écoles,
d’Hommes et de Femmes forts, de mesures fortes, des petites ﬁlles et des femmes.

quitte à les faire passer en force comme on a fait passer C’est mon deuxième gros projet, la création de l’association KALBI
la réforme de la moudouwana, pour ne pas sombrer KITABI qui naîtra en 2016. Le groupe existe déjà sur Facebook, et
dans un Maroc qui ne serait plus ce qu’il a toujours été : espère que beaucoup se joindront à notre belle cause. Je reste
pluriel, tolérant, ouvert sur le monde. très positive comme toujours !

VH magazine Août-Septembre 2015

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