Page 68 - Lire votre magazine en version PDF
P. 68

CASABLANCA 1920 -1970 I I  Maârif


                 NAISSANCE D’UN QUARTIER                                                  Convivial, le Maârif n’était pas pour autant un quartier
                 NAISSANCE D’UN QUARTIER
                                                                                          salubre. Construit sur un ravin au sol imperméable,
                                                                                          il est constamment inondé par les eaux de pluie de
                                                                                          l’hiver. Madame Gilavert se souvient que, lorsque
                                                                                          les Américains débarquent à Casablanca, c’est en
                                                                                          péniche qu’ils sillonnent le Maârif, proposant aux
                                                                                          enfants de monter faire un tour à bord de leurs
                                                                                          embarcations. L’ensemble de fermes entourées de
                                                                                          champs qui constituait initialement la commune du
                                                                                          Maârif n’ayant pas été incorporé au plan urbanistique,
                                                                                          le tracé de ces quartiers, basé sur un quadrillage
                                                                                          trop rigoureux, ne tolérait aucun espace public. Les
                                                                                          terrains ne comportaient pas de voirie. Les rues,
                                                                                          tracées en damier, n’avaient ni eau ni lumière. C’est
                                                                                          en 1933 que le Maârif est enfi n assaini. Les petites
                                                                                          maisons construites autour de patios révèlent les
                                                                                          origines ibériques et méditerranéennes des résidents
                                                                                          et l’ambiance générale du quartier est extrêmement
                                                                                          chaleureuse. De nombreux ateliers d’artisans
                                                                                          cohabitent avec les entrepôts, les cafés, les écoles,
                                                                                          les dispensaires… Les commerces sont regroupés
                                                                                          sur quelques rues. Les habitants ont un réel sentiment
                                                                                          d’appartenance : ils se sentent « Maârifi ens » avant
                                                                                          d’être Casablancais et créent même un journal
                                                                                          local. Madame Gilabert se souvient qu’à l’époque, la
                                                                                          jeunesse du Maârif était très solidaire : « Nous étions
                                                                                          très enthousiastes et très unis. Une nana du Maârif,
                                              Vue aérienne du Maârif et du bd Jean Courtin (actuel bd Brahim Roudani).  il ne fallait pas se moquer d’elle ! Les jeunes étaient
                                                                                          toujours là, comme des frères, à nous défendre ».



                                   RELIGIEUSES
                 LES FÊTES RELIGIEUSES                              Eglise du Maârif.
                 LES FÊTES
                 L´église du Maârif est édifi ée entre 1917 et 1918 par les
                 Pères de la Mission franciscaine. Elle est bâtie par le père
                 Bonaventure Cordonnier. La population du quartier est à
                 90% catholique et beaucoup sont pratiquants. Les fêtes
                                    religieuses sont célébrées en
                                    grande pompe. Les feux de la
                                    Saint-Jean (forte population
                                    d´origine d’Alicante) et les
                                    processions du 15 août                                                         Eglise du Sacré-Coeur.
                                    pour Notre-Dame de Trapani
                                    (population sicilienne) sont
                                    des rituels incontournables.
                                    Ils sont l’occasion de grandes
                                    festivités dans les rues. Le soir,
                                    place de l’église, rue du Jura,
                                    avec des bougies allumées
                                    à la main, des gens chantent
                                    l’Ave Maria, tandis que dans
                                    le ciel, des feux d’artifi ces   LES LIEUX D’ENTRAIDE
                   Notre-Dame de Trapani.
                                    illuminent tout le quartier.
                                                                 Malgré l’entraide qui soudait le quartier, l’extrême misère régnait. « Avec la guerre, nous
                                                                 avons vécu le rationnement. Le pain était de si mauvaise composition qu’il donnait de
                 Communiantes du Maârif.                         l’urticaire aux enfants », se souvient Madame Gilabert. La pauvreté de certains habitants
                                                                 du quartier pousse des sociétés de bienfaisance et des ordres religieux à créer de
                                                                 nombreux établissements scolaires et d’aides sociales (Goutte de Lait, hospices…).
                                                                 Les écoles sont d´abord construites en bois. L’école des « Babalouches » (babouch :
                                                                 escargot), derrière l´église, est remplacée par l´école du Maârif, rue Fabre d´Eglantine.
                                                                 Elle est ensuite réinstallée sur le terrain de l´école d’origine. L´école Dominique Savio,
                                                                 tenue par les Salésiens, est parrainée par Madame la Maréchale Lyautey.




                  68   VH magazine   Novembre   2011
   63   64   65   66   67   68   69   70   71   72   73