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CASABLANCA 1920 -1970 I I La résistance
Heureusement pour lui, le LE RETOUR DE MOHAMMED BEN YOUSSEF
pistolet s’est enraillé. A la suite
de cela, il nous a approchés
en demandant ce qu’il pouvait Le 11 juin 1955, Jacques Lemaigre Alors que les notables marocains français, la délégation marocaine tient
faire. Nous l’avons donc amené Dubreuil est assassiné. Sa mort et les hommes politiques français bon et exige des négociations avec
en France, pour expliquer aux choque l’opinion, au Maroc mais sont déjà là, ils voient arriver Mohammed Ben Youssef. Thami El
Français qu’il fallait que le sultan aussi en France. Elle a sans doute progressivement de nouveaux Glaoui sent que le vent a tourné et
Mohammed Ben Youssef et sa hâté la tenue de la rencontre visages : ceux des résistants, appelle au retour du Sultan. A l’issue de
famille reviennent au Maroc. On franco-marocaine qui s’ouvre à notamment celui d’Abderrahim la rencontre, il est décidé de déposer
avait aussi le colonel Bekkali Aix-les-Bains le 22 août 1955. Bouabid. Face aux compromis Ibn Arafa, de former un conseil de
qui avait perdu sa jambe dans Edgar Faure la joue fi nement. proposés par le gouvernement tutelle et d’accélérer la formation d’un
gouvernement marocain représentatif
de toutes les appartenances politiques.
Mais c’est le futur roi Mohammed V
lui-même qui achève de convaincre
les Français d’accorder au Maroc
son indépendance. Entre le 2 et le 6
novembre, il rencontre ces dirigeants
et notamment le premier d’entre eux,
Antoine Pinay, président du Conseil. Il
apparaît comme l’antithèse de l’image
qu’en donnent les colons : cultivé, fi n,
modéré. Les accords de la Celle Saint-
Cloud, qui scellent l’indépendance du
Maroc, sont signés. Le Glaoui vient
s’agenouiller devant le futur Roi pour
implorer un pardon qui lui est accordé.
Le 16 novembre 1955, le souverain
Ahmed Benkirane devant la voiture criblée de balles de Jacques Lemaigre Dubreuil. Retour de Mohammed V au Maroc après son exil. fait un retour triomphal au Maroc.
l’armée française. On avait un Thami El Glaoui implorant le pardon de Mohammed V.
Marocain qui s’était converti
au christianisme, le père Jean-
Mohammed Abdel-Jalil, qui
portait une soutane et parlait
comme un Fassi… Du coup, les
Français se sont interrogés : voici
un colonel de l’armée française
qui dit la même chose qu’un
prêtre, qui dit la même chose que
les jeunes nationalistes que nous
étions… »
En 1955, Edgar Faure, alors
président du Conseil, nomme Abderrahim Bouabid avec des officiels français.
Gilbert Grandval à la résidence.
L’homme est un grand résistant,
venu au Maroc pour assurer
une transition pacifi que. A peine
arrivé, il manque de peu d’être
lynché par des colons déchaînés.
« C’était un homme de bonne foi,
affi rme Ahmed Benkirane. Mais
quand il est arrivé, les choses
étaient déjà très compliquées.
C’est la population française qui
l’a le plus combattu, pas nous. »
Grandval décide faire le ménage
à la résidence, en révoquant les
directeurs les plus extrémistes.
Ceux-ci ameutent leurs soutiens
à Paris. Menacé de mort, le
résident général est lâché par Mohammed Ben Youssef s’entretenant avec Antoine Pinay.
Paris et doit regagner la France.
108 VH magazine Novembre 2011

